Les valises sont sur le point d’être bouclées.
Après un vernissage aussi réussi, heureux, c’est une bonne chose de se retrouver confronté à la réalité de l’Oasis et de nos amis de Guié. L’enthousiasme d’un tel succès pourrait nous endormir comme l’écrit Aristide Tarnagda.
Aristide est le nouveau patron des Récréatrales, un festival d’animations théâtrales et de théâtre organisé dans un quartier de Ouagadougou avec les habitants de celui-ci (http://recreatrales.org/).
C’est dire si le festival est proche de nos Vernissages! Nous l’avons connu lors du voyage au Burkina Faso de 2014.
Proche en terme de réalisation sur le terrain, mais pas que !
Voici un texte où Aristide, acteur, auteur, metteur en scène, nous parle de son ressenti et de ses motivations. C’est aussi en très beau texte sur l’engagement et le courage.
C’est tout ce qui motive Initial BBB.
Aristide Tarnagda à propos de l’édition 2018 des Récréatrales :
À peine avons-nous pris notre élan pour notre horizon rêvé que notre ciel s’assombrit. Désormais nous vivons la peur et la méfiance au ventre. Notre terre est tout le temps attaquée. Piégée. Ces enfants explosés. Notre humanité coule dans son sang. Tantôt au nord tantôt à l’est tantôt au cœur de notre intégrité. Désormais notre terre est baptisée « zone rouge ». On nous fait peur et nous faisons paradoxalement peur à notre tour. Nos amis ne veulent plus fouler le sol de nos ancêtres. Notre histoire bégaie. Balbutie. Alors que faire ? Que nous dire à nous-mêmes ? Que dire au monde ? Devons-nous continuer de respecter l’ordre établi ? A penser que la culture et l’art sont du luxe et que nous n’avons besoin que du maïs et du riz ? Quel théâtre, quelle musique, quel pas de danse, quelle peinture, quel art pour fertiliser, fermenter et cimenter le vivre ensemble ? Et si nous pensions à l’art du courage ? Le courage tressé. Le courage dressé. Le courage lavé. Le courage chanté. Le courage loué. L’art du courage tressé ensemble. Le courage de dire non au bâclage de l’Homme. Le courage d’exiger de nous-mêmes d’abord. Le courage de la transcendance. Le courage de dire que nous ne voulons plus être à la périphérie. Le courage de dire que les seules croissances qui vaillent la peine ce sont celles du rire et du cœur de l’homme. Le courage de dire que nous sommes venus sur la terre pour Etre et pas qu’avoir, avoir et avoir. Le courage de miser sur l’Homme, sur l’utopie, le rêve, la beauté, l’émerveillement. Etre ensemble. Jours et nuits. Faut donc réapprendre à l’être humain l’art d’être ensemble. Remettre la beauté, le rêve, l’émerveillement au cœur de toute politique. Ici il n’y a pas d’autre entêtement que celui d’être ensemble ; se dépasser pour accepter l’autre; le porter. Etre avec lui. Ensemencer le sens ensemble. Ici il n’y a pas d’autre prétention que celle d’interroger et de s’interroger : l’Homme ou la bête ou la machine ? La beauté ou la barbarie ? Depuis une année plus de trois cents artistes venus des quatre coins d’Afrique et du monde ainsi que les habitants de Bougsemtenga, en dépit du craquellement de l’espoir, s’activent à alimenter, à rendre possible, réel, convivial et beau cet espace d’être ensemble.
Et comme écrivait Wajdi Mouawad « Maintenant que nous sommes ensemble ça va mieux. »
Bienvenue. Trois fois bienvenue.
Bon festival.
Aristide Tarnagda
Commentaires récents